Bruno Le Maire, écrivain français
Candidat à la présidence de l’UMP, cet ancien ministre conçoit la France à travers sa langue.
Dans une demi-heure ce dimanche, il endossera son personnage de candidat à la présidence de l’UMP. Mais là, maintenant, Bruno Le Maire entre dans le bistrot de la place de La Loupe. On a potassé son sujet, alors on s’attend à voir entrer un Janus. Un être à deux faces : d’un côté, un politique ; de l’autre, un écrivain. Et puis quoi ? non. Sa chemise, sa posture, sa notoriété, on pourrait croire qu’il va dénoter parmi les habitués du PMU. Pas du tout, il sert les mains, cause un peu, est à l’aise grâce à ses réflexes d’élu de terrain. Le brouhaha continu du café le prouve, l’homme public, l’écrivain, l’ancien ministre, est passé comme s’il était un gars du coin.
Il est né dans les livres. Pour ce fils d’un haut cadre de l’indus- trie du pétrole et d’une directrice d’établissement catholique d’enseignement, on imagine les rangées d’ouvrages dans la bibliothèque derrière le piano. « Oui, il y avait des livres partout », se souvient-il. Et oui, il est musicien.« J’ai toujours eu l’impression d’écrire. Les cartes postales, c’est mon premier souvenir. Ca peut sembler bête mais c’est le point de départ. Ensuite viennent les carnets, les compositions et puis, à un moment, on se dit pourquoi ne pas faire un vrai livre ? », raconte-t-il. Pour- tant, impossible de lui faire citer un véritable ouvrage fondateur. Pas de madeleine donc, pour cet ancien agrégé de lettres qui a consacré un mémoire à Proust. Alors, quoi ? Le besoin de passer des messages ? « Je me conçois comme homme politique et écrivain. Les deux sont ce que je suis », explique-t-il. Il voulait d’abord être professeur. Il l’a été durant deux ans. Puis il voulait rentrer dans l’action. « Sinon, j’aurai été malheureux », dit-il. Il a publié une trilogie sur son expérience gouvernementale (« le Ministre », « Des hommes d’État », « Jours de pouvoir ») mais il ne compte plus produire de nouvelles chroniques. Et pourtant, il a édité mi-septembre un livre, « À nos enfants », sur son histoire personnelle : « Mon intimité passe par l’écriture, seulement par elle. »
« J’aime la politique, j’aime la littérature : les deux sont mêlées. Regardez les chefs d’œuvre de la littérature : ils sont tous imprégnés de politique. “La Chartreuse de Parme”, c’est politique. » Il propose une lecture de l’histoire à travers le langage : on invente la France en unissant langues d’Oc et d’Oil, puis l’édit de Nantes, le combat sur les langues régio- nales : tout ça, c’est une façon d’affirmer l’unité de la nation. Nous y voilà : le roman national, c’est sa langue.