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« Développer la filière française du cornichon »

Responsable marketing et communication de Reitzel, Aline Martin explique la stratégie de l’opérateur industriel, dont l’une des usines est implantée à Montrichard-Val-de-Cher (Loir-et-Cher).

Horizons  : Pouvez-vous nous présenter votre entreprise  ?

Aline Martin  : Reitzel fabrique des condiments, principalement des légumes au vinaigre (cornichons, oignons, etc.). Outre des bureaux à Paris, nous avons des usines à Montrichard-Val-de-Cher (Loir-et-Cher) et à Connerré (Sarthe). Reitzel est une entreprise helvétique née en 1909. Elle est arrivée en France en 2000 lors du rachat de la société Guy-Briand. Nous employons plus de 120 personnes dans l’Hexagone pour un chiffre d’affaires de plus de 40 millions d’euros. Nous travaillons essentiellement sous marques distributeurs. Nous avons également nos propres marques  : Jardin d’Orante pour la grande distribution, Hugo Reitzel pour la restauration et les collectivités et Bravo Hugo pour le bio. Par ailleurs, via Jardin d’Orante, en 2016, nous avons relancé la filière française du cornichon.

Quelle est précisément l’activité de votre usine de Montrichard-Val-de-Cher  ?

Celle-ci emploie 70 personnes. Nous recevons des cornichons et autres. Nous fabriquons du jus de vinaigre, nous mettons le produit dans des bocaux, nous étiquetons et nous expédions dans nos différents réseaux. Le vinaigre est un conservateur naturel très ancien. Et grâce à l’activité condimentaire, on peut manger du légume de saison toute l’année.

Qu’est-ce qui a poussé Reitzel à relancer la filière française du cornichon en 2016   ?

Le cornichon est un symbole de la gastronomie française. Or les cornichons consommés dans notre pays proviennent d’Inde (80  %) et d’Europe de l’Est (20  %). Nous voulions remettre le cornichon à sa place d’origine. Ce fruit a été découvert au pied de l’Himalaya au début de notre ère. Il est arrivé en France au XVIIIe siècle et y a été produit jusqu’à la fin des années 1990. Sous l’effet de la mondialisation, les industriels se sont réapprovisionnés en Inde car trois récoltes par an sont possibles là-bas, contre une seule en France.

En quoi la production de cornichons est-elle difficile  ?

Dans la mesure où on ne savait plus produire du cornichon en France, nous avons mis en place des sécurités afin de recruter des agriculteurs. Deuxièmement, quand on développe le cornichon français et que les consommateurs pensent que nos concurrents sont également nationaux, briser le plafond de verre est difficile. Chez les autres, les cornichons sont peut-être conditionnés en France mais ils poussent en Inde. Or Reitzel s’inscrit dans une démarche de traçabilité, de filière et de création de valeur.

Le cornichon pousse uniquement entre 15 et 35  °C. On le plante en mai et la récolte a lieu en juillet et août. Celle-ci n’est pas mécanisable. De nombreux cueilleurs sont donc nécessaires. Par ailleurs, le fruit peut doubler de volume en une journée. Il faut donc passer plusieurs fois par jour dans la parcelle pour le cueillir à la bonne taille. Implanter durablement cette filière suppose de relever des défis culturaux et économiques.

Quelle est votre production  ?

Depuis quatre ans, nous avons connu une belle évolution. En 2016, nous avions 2 agriculteurs partenaires et 4 hectares pour une récolte de 60 tonnes, soit 110  000 bocaux. En 2019, nous avons atteint 20 ha pour une production de 850  000 bocaux avec 12 agriculteurs partenaires.

Recherchez-vous de nouveaux producteurs  ?

Le cornichon français pèse 1  % de part de marché. Les producteurs avec lesquels nous travaillons ont fondé une association, les Cornichonneurs français. Celle-ci est en croissance car nous cherchons à recruter chaque année de nouveaux partenaires.

À quel prix achetez-vous la tonne de cornichons aux agriculteurs et quel accompagnement mettez-vous en œuvre  ?

Le prix est une donnée confidentielle entre le producteur et nous. Je peux cependant vous dire qu’un cornichon français est six fois plus cher qu’un cornichon indien. Pour le rendre accessible, nous avons réduit nos marges et parié sur les volumes. Les agriculteurs bénéficient de trois sécurités. Premièrement, nous mettons un ingénieur agronome à disposition. Souvent, nous avons affaire à des maraîchers qui cultivent des fraises ou des asperges. Ils ont l’habitude de travailler avec des cueilleurs. Cependant, il faut apprivoiser ce fruit particulier issu d’une plante grimpante.

Deuxièmement, nous proposons une assurance-calibre. Nous sensibilisons les consommateurs à la naturalité du champ. Le marché demande du petit cornichon. Pendant vingt ans, nos concurrents ont promu un produit extra-fin. Or un cornichon double chaque jour de volume. Nous achetons tous les calibres aux agriculteurs et nous valorisons les produits à travers nos différents canaux. La troisième sécurité est l’assurance-récolte. Lorsque les agriculteurs ont une surproduction, nous achetons tout le volume. En cas d’accident climatique et de destruction de la culture, nous remboursons les frais engagés par l’agriculteur. Notre démarche s’inspire du commerce équitable même si nous ne sommes pas labellisés.

Quels sont vos débouchés  ?

Dès que les cornichons sont récoltés, ils arrivent dans notre atelier de production. Nous les lavons, nous les trions et nous les conditionnons. Via Jardin d’Orante, nous avons quatre bocaux avec des recettes vinaigrées (petits calibres) et aigres-douces (gros calibres). Nous mettons également des cornichons en boîte pour des restaurateurs et des industriels. Ces derniers fabriquent des sandwichs et des salades composées.

Quels sont les projets de votre entreprise  ?

Nous voulons développer la filière française du cornichon. Nous affichons l’origine de nos produits sur nos bocaux. Nous aimerions que nos concurrents fassent de même afin que les gens sachent ce qu’ils achètent. Tant qu’ils pensent manger français, notre filière ne pourra pas prendre la place qu’elle mérite. Par ailleurs, nous proposons le kit Mon cornichon maison. Celui-ci est vendu 3 euros sur le site Jardindorante.fr. Objectif  : faire pousser des cornichons chez soi. Les recettes sont reversées aux Cornichonneurs français  : une action qui existe depuis trois ans.

Propos recueillis par Olivier Joly

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