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Nuisibles
Dégâts de corvidés : quelles solutions ?

Depuis plusieurs années, les dégâts de corvidés ne cessent de croître dans le département. Le manque à gagner se fait principalement sentir sur les cultures de tournesol et de maïs.

corbeaux dans un champ de blé qui lève.
© Archives - Horizons

Les producteurs de grandes cultures sont à bout. D’année en année, les dégâts de corvidés s’accentuent, entraînant des coûts supplémentaires de ressemis. Les oiseaux s’attaquent majoritairement aux cultures de tournesol et de maïs et cela désormais tout au long de l’année, en particulier au moment du semis et de la levée. Les principales espèces de corvidés déprédatrices sont la corneille noire et le corbeau freux. Si les deux espèces revêtent un plumage noir, le corbeau se différencie par son bec blanc grisâtre. La corneille est quant à elle entièrement noire, y compris son bec. Les corvidés sont classés comme animaux nuisibles dans le département du Loiret, mais leur régulation reste très difficile.

Période de régulation

La régulation des corneilles et des corbeaux en tant qu'Espèces susceptibles d'occasionner des dégâts (Esod) démarre à la date de clôture générale de la chasse et s’achève au 31 juillet. Les corvidés peuvent donc être détruits à tir durant cette période, mais aussi être piégés toute l'année et en tout lieu. Le préfet peut également décider d'organiser des chasses ou des battues générales ou particulières chaque fois que c'est nécessaire. De leur côté, les maires peuvent ordonner des battues portant sur ces espèces classées nuisibles. Durant des périodes d’extrême vulnérabilité, comme le mois d’août pour le tournesol, les exploitants agricoles peuvent demander à la Direction départementale des Territoires (DDT) une autorisation de battue particulière.

Comprendre la gradation des dégâts

Ces dernières années, la pression des corvidés sur les cultures s’est accentuée. Christophe Sausse, agronome au sein de l’institut technique Terres Inovia, nous donne des pistes vraisemblables pour comprendre la croissance de ce phénomène : « Contrairement à l’expansion démographique du pigeon ramier au niveau européen, les populations de corvidés sont plutôt stables. La recrudescence des dégâts de corvidés sur les cultures pourrait donc s’expliquer par la suppression d’utilisation de certains traitements répulsifs à oiseaux, mais aussi par la suppression d’utilisation de certains insecticides et molluscicides. Les évolutions globales du territoire peuvent également être à l’origine de ces nouvelles dynamiques : le climat et les paysages changent, et des espèces comme le corbeau freux et la corneille noire tirent parti de ces nouvelles ressources ».

Afin de comprendre ces nouvelles dynamiques, Terres Inovia, l’Inrae (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) et l’Anamso (Association nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences oléagineuses) ont lancé le projet Lido (Limitation des dégâts d’oiseaux), financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR). « Ce projet vise à comprendre le niveau, la localisation et la chronologie des dégâts pour trouver des solutions concrètes avec les exploitants », précise Christophe Sausse. Les zones d’études sont au nombre de trois, dont une en Beauce-Gâtinais.

Des solutions en phase de test

Interrogé, Arnaud Rousseau, président de la Fédération des producteurs d’oléoprotéagineux et du conseil d’administration d’Avril gestion, nous dévoile que de nouvelles solutions d’enrobage sont actuellement en phase de test : « Cette année, l’institut technique Terres Inovia réalise des tests d’enrobages répulsifs sur des produits de biocontrôle ». Même s’il est encore trop tôt pour connaître les premiers résultats, Terres Inovia est conscient que les problématiques de dégâts de corvidés doivent être solutionnées pour que les exploitants agricoles puissent durablement produire. « Nous avons besoin de trouver des produits répulsifs et idéalement des produits de biocontrôle afin de limiter l’impact environnemental », conclut-il.


Déclarer ses dégâts à la Fédération des chasseurs

Alain Machenin préside la Fédération des chasseurs du Loiret.
Même s'ils ne sont pas indemnisés, les exploitants agricoles sont vivement invités à déclarer leurs dégâts parcellaires dus aux corvidés. « Chaque année, nous présentons un dossier à la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, présidée par la préfète, qui le transmet après validation au ministère. Cela nous permet de classer les corvidés comme étant des espèces nuisibles, explique Alain Machenin, président de la Fédération départementale des chasseurs. Afin de prouver les nuisances de ces oiseaux sur les cultures agricoles et leur présence significative dans le département, il nous faut constituer un dossier complet ». Une fois les corvidés considérés comme Espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (Esod), la Fédération des chasseurs peut plus facilement les réguler et les piéger.
 

Les chasseurs viennent en aide aux exploitants

Ainsi, des équipes de chasseurs sont prêtes à intervenir chez les agriculteurs de façon bénévole pour limiter l’impact des dégâts de ces oiseaux. L'exploitant agricole doit alors donner le droit de chasser sur ses terres. « Cette autorisation doit se faire en bonne intelligence », précise Alain Machenin. La Fédération des chasseurs propose également des formations afin d'apprendre à tirer le corbeau freux. « Il s'agit d'une méthode particulière de tir, souligne le président, car le corbeau est très difficile à chasser. Cette méthode permet d'obtenir des résultats significatifs ». Enfin, sous arrêtés préfectoraux, les lieutenants de louveterie peuvent intervenir dans des zones d'ordinaire interdites à la chasse. Afin de faire parvenir votre déclaration de sinistre parcellaire, contactez l'agent de développement de la Fédération de chasse de votre secteur. Les contacts par secteur sont à retrouver ici.


Nicolas Digard :  « Pour repousser les corvidés, il faut sans cesse adapter ses méthodes de lutte »

Agriculteur céréalier à Saint-Gondon, Nicolas Digard cultive des céréales et des oléagineux sur 180 hectares. Depuis cinq ans, il cultive du tournesol et se retrouve confronté aux dégâts de corvidés et pigeons.

« Les semis de tournesol et de maïs se faisant en dehors de la période de chasse, la DDT* a la gentillesse de nous accorder des dérogations afin de pouvoir protéger par tirs nos parcelles. Malheureusement, je ne peux pas toujours lutter efficacement : entre mes semis, ma vie familiale et mon entreprise, je ne peux me consacrer que partiellement à la régulation de ces oiseaux. » Pour se prémunir des dégâts de corvidés et de pigeons, le céréalier peut compter sur un de ses amis, Philippe Pesson, chasseur depuis cinquante ans. « Philippe intervient dès qu'il le peut. »

Parallèlement, Nicolas Digard utilise des effaroucheurs. « Lorsque Philippe ne peut pas intervenir, j'installe des effaroucheurs à gaz, mais les animaux s’y habituent rapidement. De plus, leur utilisation n'est pas évidente compte tenu des nuisances sonores engendrées pour le voisinage. Je place alors des effaroucheurs visuels et sonores. L’avantage de l'effaroucheur sonore est qu'il possède une large gamme de bruits qui peut faire fuir petit et grand gibier. » L'exploitant agricole place quatre effaroucheurs sonores couvrant jusqu’à quatre hectares chacun. « Pour éviter que les oiseaux ne s’y habituent, il faut les changer régulièrement de place. Il faut également veiller à alterner ces méthodes de lutte car les corvidés ont une faculté d'adaptation stupéfiante. »

Enfin, pour la première fois, l'agriculteur va utiliser à titre d'essai du Korit, un produit répulsif corbeau sur semences de maïs, afin de déterminer son impact.


Didier Ploton : « J’essaye d’être présent le plus possible et j’utilise des effaroucheurs »

Installé depuis le 1er janvier 2000 à Saint-Aignan-le-Jaillard, Didier Ploton cultive, sur 154 hectares, principalement du maïs irrigué, du blé, de l’orge d’hiver, du colza, ainsi que du tournesol sur 15 à 20 hectares. Lui et son père, avant lui, ont toujours connu des dégâts de corvidés. Il témoigne.

« Situé dans le Val de Loire, le tournesol est une culture importante pour mon exploitation aux terres argileuses. Je cultive le tournesol après un maïs irrigué, ce qui me permet d'implanter un blé en très bonnes conditions l'année suivante. Je fais face à des dégâts de corbeaux tout au long de l’année : de fin août à début septembre lors de mes semis de colza, puis lors de mes semis tardifs de blé en novembre, au printemps, sur les semis de tournesol, et depuis quelques années sur les semis de maïs au mois de mars et avril. Pour lutter contre les corvidés, je demande des dérogations auprès de la DDT*, mais il n'est pas toujours facile de trouver un chasseur prêt à intervenir tôt le matin, le week-end et le soir après son travail. J'essaye d'être présent un maximum sur mes parcelles pour faire fuir les oiseaux. J'utilise également des effaroucheurs visuels et sonores ainsi que des canons à gaz automatiques pour lesquels je configure leurs moments d’action.


*Direction départementale des Territoires.

 

Patrick Langlois : « Corbeaux : marée noire sur le Loiret »

patrick Langlois
Le président de la FNSEA 45 du Loiret revient sur les mesures pour faire face aux dégâts provoqués par les corvidés sur les cultures.
« Maître Corbeau est peut-être le phénix des hôtes de ces bois, mais pas celui des champs des agriculteurs loirétains ! Il n’y a pas un jour sans que les agriculteurs nous fassent part de leur exaspération face aux attaques répétées des corvidés (corbeaux, choucas…), sans oublier les dégâts occasionnées par le sanglier bien évidemment. ll n’y a qu’à faire quelques kilomètres sur les routes de campagne pour en comptabiliser plusieurs dizaines.
Face à cette marée noire qui risque d’envahir en masse les semis de maïs, de tournesol et les jeunes plants de légumes, une régulation efficace doit être mise en place urgemment en commençant par le tir des corbeautières. Car sur son arbre perché, le corbeau est un animal très malin, difficile à déloger. Sans compter que les solutions chimiques disponibles pour protéger les cultures des dégâts causés par ces oiseaux continuent de se raréfier. Des dégâts également dus à la fameuse transition agroécologique tant voulue par certains, qui a engendré la réduction de produits phytosanitaires tels que l'anthraquinone (répulsif très efficace à l'époque).
Sur ce dossier, nous ne pouvons qu’inciter au bon sens et au dialogue, toujours constructif.
Alors signalez-nous la présence de corbeautières, nous solliciterons les louvetiers. Rapprochez-vous de vos détenteurs de droits de chasse (sociétés de chasse, détenteurs privés, etc.).
Élaguez vos arbres.
Pensez à user de l'autorisation du piégeage toute l’année avec les cages à corbeaux.
Organisez-vous entre collègues agriculteurs pour réguler les populations de corbeaux à la veille des premiers semis de maïs.
Intéressez-vous à notre effaroucheur laser (lire ci-dessous, NDLR) pour faire fuir les adultes à la tombée de la nuit et faire descendre les œufs en température.
Et surtout, n’oubliez pas : même si les dégâts ne sont pas indemnisables, faites remonter vos déclarations de dégâts à la fédération de chasseurs pour maintenir le caractère nuisible des corvidés et faire évoluer la loi concernant le choucas.
Alors mon bon Monsieur ­Corbeau, même si votre ramage se rapporte à votre plumage, sachez que les agriculteurs du Loiret vous ont à l’œil et attendent un engagement total de l’administration pour que l’on ne vous y reprenne plus ! »

Les corvidés effarouchés grâce au laser

Depuis plusieurs semaines, la FNSEA CVL intervient dans les départements de la région avec le LazerTrac 40, un appareil autonome qui effarouche les volatiles afin d'éviter les dégâts dans les parcelles.

Les dégâts de corvidés dans les parcelles ne cessent pas. L’objectif de la nouvelle solution proposée par la FNSEA Centre-Val de Loire est d’effaroucher les corvidés adultes à la tombée de la nuit ou avant le lever du soleil grâce à un appareil laser autonome, le LazerTrac 40. Le principe est de leur faire quitter les nids et ainsi agir sur les naissances car les œufs sont sensibles aux variations de température. Il faut intervenir lors de la période de nidification. Le fait de laisser les œufs quelques heures au froid va permettre de réguler les naissances et stabiliser les populations.

La FNSEA CVL propose un achat groupé de l'appareil. Si cela vous intéresse ou pour tout renseignement, contactez Solène Gourdet au 06.28.01.51.61 ou à solène.gourdet@agricvl.fr.

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