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«  En vingt-cinq ans de métier, je n’ai jamais vu cela  !  »

Ingénieur agronome, Patrice Terrier est conseiller en grandes cultures à la chambre d’Agriculture. Il dresse un état des lieux agronomique de la Beauce-Gâtine. Cette interview a été réalisée par téléphone le 9 avril.

Horizons  : Quels sont votre périmètre d’intervention et les caractéristiques du sol sur cette zone  ?

Patrice Terrier  : J’interviens sur l’ouest de la Beauce-Gâtine, entre Loire et Loir. La frontière, c’est la route départementale qui relie Blois à Vendôme. Tout ce qui se trouve à gauche représente mon secteur d’activité. Cela correspond aux Groupements de développement agricole (GDA) de Saint-Amand-Longpré et d’Herbault. Le sol est très varié car nous sommes à la fin de la Beauce et au début de la Gâtine. Dans le premier cas, le sol est argilo-calcaire, plus ou moins superficiel du côté d’Averdon. On trouve aussi des sols plus profonds, des limons de Beauce, vers Saint-Amand-Longpré, Crucheray et Nourray. En Gâtine, les sols sont hydromorphes avec de l’argile à silex, nécessitant un drainage. On appelle cela des limons battants, avec 10  % à 15  % d’argile. On trouve aussi des «  perrets  » plus superficiels avec des cailloux en silex. Les potentiels sont moins bons. Près de la Loire, les sols sont sableux. Le GDA d’Herbault résume tous les sols du département. Par endroits, nous trouvons même des terres noires. Celles-ci contiennent 30  % à 40  % d’argile.

Quel bilan tirez-vous des semis de printemps  ?

En raison du décalage de l’automne dernier, certains agriculteurs n’avaient pas semé ce qu’ils souhaitaient. Ils ont donc essayé de faire des cultures de printemps, type orge, blé dur et protéagineux. Cela s’est terminé lorsque le temps est redevenu sec. D’un point de vue calendaire, ce n’est pas optimal. Cependant, cela concernait les dernières parcelles. La majorité a été semée à l’automne. Lin et pavot sur Crucheray se sont faits la semaine dernière. Garder de la fraîcheur et de l’humidité pour que ces petites graines germent alors que le sol séchait très vite en surface était compliqué. Les agriculteurs devront irriguer de nombreuses parcelles. Pour le maïs et le tournesol, c’est à peine commencé.

Que peut-on dire de la protection contre les maladies fongiques  ?

En Gâtine, les semis se font début octobre. Les agriculteurs ne veulent pas prendre le risque d’un décalage. En effet, si l’humidité revient trop vite, ils ne peuvent plus semer. En revanche, une grande partie des agriculteurs sème fin octobre pour des problématiques de désherbage. Cette année, en raison des pluies de l’automne, des agriculteurs n’ont pas semé. D’où des décalages en novembre, décembre et janvier. Les derniers semis se sont faits récemment. La plupart des blés ne sont pas encore au stade deux nœuds.

Nous voyons de la septoriose mais les agriculteurs patientent jusqu’à la semaine prochaine pour traiter. En Gâtine, le blé est à deux nœuds avec une présence plus forte de la septoriose. Les agriculteurs appliquent donc leurs traitements, d’autant que la météo s’annonce pluvieuse pour le week-end. Or ces conditions favorisent le développement de la maladie. Les orges sont plus avancées et les traitements se font à un nœud. La plupart des applications sont terminées. Objectif  : bloquer la rhynchosporiose. Les traitements fongicides sur colza ont été effectués la semaine dernière et ces jours-ci. Le temps froid et sec de la semaine précédente ne favorisait pas le développement du sclérotinia. Cela a permis de décaler les traitements.

Quelles sont les problématiques qui ont été soulevées lors des derniers tours de plaine  ?

La jaunisse nanisante de l’orge est la problématique de l’année. Nous l’avions déjà constaté début mars, avant le confinement. Depuis, le phénomène s’est intensifié. Cela concerne les orges semées en octobre. Certaines parcelles ont été retournées. En vingt-cinq ans de métier, je n’ai jamais vu des attaques aussi prononcées sur les orges d’hiver  ! Les blés semés tôt rencontrent le même souci. Du fait des conditions climatiques de l’automne dernier, les agriculteurs pensaient plus à semer qu’à protéger leurs céréales. Malheureusement, ils ont laissé passer des pucerons. Ceux-ci ont transféré la virose sur les plantes. Dans les prochaines semaines, de plus en plus de symptômes se manifesteront.

Propos recueillis par Olivier Joly

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