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Interview d’Henri Brichart, vice-président de la FNSEA

«La notion de contrôle pédagogique est tout aussi importante»

Henri Brichart, vice-président de la FNSEA.
Henri Brichart, vice-président de la FNSEA.
© Rita Lemoine

Alors que la mission mise en place par le Premier ministre pour simplifier les contrôles réalisés auprès des agriculteurs poursuit son travail, Henri Brichart revient sur les attentes et propositions de la FNSEA en la matière, en rappelant la nécessité de simplifier les différentes réglementations.

Pourquoi les contrôles sont-ils mal vécus par les agriculteurs aujourd’hui ?

Henri Brichart : Le sujet global des contrôles est très compliqué car la situation est plus ou moins difficile en fonction des domaines. Sur certains dossiers, je pense en particulier à la PAC, on a moins de souci qu’avec ce qui touche à l’environnement ou au travail, où les administrations sont très dures. Quand des agents de l’ONEMA viennent sur les exploitations avec un colt à la ceinture, je ne suis pas sûr que ce soient les bonnes conditions pour qu’un contrôle se passe correctement. Le but du contrôle, c’est avant tout de faire respecter des conditions de production ou d’application des lois, et non de mettre des pénalités et de remplir les caisses de l’Etat. Il faut bien discerner dans les contrôles la notion d’erreur, que n’importe qui peut faire, y compris les contrôleurs de l’administration, de la faute intentionnelle plus difficilement défendable. Nous, nous défendons le droit à l’erreur, liée à une mauvaise connaissance d’une réglementation abondante et qui change tout le temps, et plus on alertera l’agriculteur en amont pour qu’il rectifie ses pratiques, plus les contrôles seront acceptés. C’est pourquoi la notion de contrôle pédagogique est tout aussi importante. Même si à un moment, bien sûr, la sanction doit exister car il y aura toujours des gens qui ne feront pas d’effort ou qui intentionnellement auront de mauvaises pratiques. La pédagogie est d’autant plus importante que les réglementations changent régulièrement et sont souvent difficilement connues par les agriculteurs. Quand on a de grosses difficultés à définir ce qu’est un cours d’eau, que l’agriculteur n’a pas les références, comment voulez-vous après qu’il respecte la réglementation autour des cours d‘eau ? Il faut donc avant tout rendre la réglementation pragmatique et applicable. Autre exemple, les agriculteurs devront déclarer dans la prochaine PAC leur linéaire de haie. Or, sur les cartes que l’on a pour les déclarations PAC, 10 mètres dans la nature équivalent à 2 millimètres sur la photo : il y a forcément une marge d’erreur, qu’il faut intégrer dans la réglementation et dans le contrôle. C’est normal qu’il y ait des contrôles, on ne les remet pas en cause, mais ils seront d’autant plus simples et acceptés que leur objet repose sur des bases compréhensibles, stables et connues.

Quelles autres pistes d’amélioration proposez-vous ?

H. B. : Pour que les choses se passent mieux, il faut que les agriculteurs puissent être assistés au moment du contrôle et ne se retrouvent pas tout seul, car c’est compliqué à vivre, étant donnés les impacts financiers et pénaux que cela peut entraîner. Il faudrait également que l’agriculteur puisse être prévenu à l’avance, ce qui ne se fait pas toujours. Par exemple, lors de contrôles de l’Onema, le contrôleur ne prévient pas forcément qu’il vient, ou vient parfois contrôler sans le signaler à l’agriculteur qui ensuite peut se retrouver des mois après au tribunal, sans avoir capacité à amener des éléments de preuve. L’amélioration des contrôles dépend aussi de la capacité à bien écrire les droits et devoirs du contrôlé et du contrôleur, on peut parler d’une charte, pour fluidifier les relations, en concertation entre la profession et l’administration. Nous militons aussi pour une commission de recours départementale, puisque tout justiciable a droit à un recours. De la même manière, si l’administration locale avait plus de capacité à juger avec pragmatisme et bon sens, cela permettrait de régler un certain nombre de points plus facilement, comme c’était le cas il y a cinq ou dix ans en discutant avec son DDT. Maintenant, de plus en plus de réglementations arrivent au niveau national et les administrations locales ont de moins en moins de capacité à régler les problèmes elles-mêmes. Alors qu’il y a une grosse différence entre la théorie et la pratique : une même règle nationale, quand on l’applique sur des sols différents, des climats différents, ne donne pas les mêmes effets. C’est aussi à l’administration de trouver les moyens de communiquer sur ces réglementations. Les exploitations agricoles sont des TPE, l’agriculteur qui doit faire son métier de producteur, de chef d’entreprise, de commerçant, n’est pas toujours en capacité d’aller à la recherche de la réglementation et de voir s’il l’applique correctement. Face à cette ribambelle de normes qui évoluent constamment, malgré toute la bonne volonté possible, c’est très compliqué pour un agriculteur d’être toujours bien dans les clous et de répondre à ces règles. Suite à la manifestation FNSEA/JA du 5 novembre, le premier ministre a mis en place une mission chargée d’améliorer les contrôles sur les exploitations.

Pensez-vous que cela va changer les choses ?

H. B. : La mission porte sur les contrôles, mais ce que nous essayons de mettre en avant, c’est que le contrôle n’est que la conséquence d’une réglementation. Nous sommes donc d’emblée un peu sceptiques, car il y a des progrès à faire sur les contrôles mais si au préalable il n’y a pas une forme de révolution sur tout ce qui est normatif, on sera confronté au même problème. Or dans le cahier des charges de la mission, il est bien précisé que le but n’est pas de toucher à la réglementation. Cependant, la mission comprend un agriculteur et une DDT, des gens qui sont sur le terrain, ils sont en capacité de bien peser le problème et d’imaginer les solutions, mais il faudra également qu’ils aient la possibilité de les faire passer.

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