Le préfet d'Eure-et-Loir en visite sur le thème de la femme en agriculture
La visite du préfet Hervé Jonathan sur l'exploitation de Sylvie Daguet, mardi 29 avril à Serazereux (Eure-et-Loir), a été l'occasion de parler de la place de la femme en agriculture.
La visite du préfet Hervé Jonathan sur l'exploitation de Sylvie Daguet, mardi 29 avril à Serazereux (Eure-et-Loir), a été l'occasion de parler de la place de la femme en agriculture.




Le préfet Hervé Jonathan visite volontiers des exploitations agricoles du département depuis son arrivée en Eure-et-Loir. Celle du 29 avril dernier revêt cependant une tonalité particulière puisqu'il se rend sur la ferme de Sylvie Daguet à Serazereux (Eure-et-Loir), pour parler de la place des femmes en agriculture.
Tour de ferme
Un tour de la ferme donne l'occasion à Christophe et Sylvie Daguet de revenir sur les dernières campagnes : « C'est compliqué depuis quelques années et l'an dernier, nous avons fait une année blanche ». C'est le moment aussi d'évoquer le fonctionnement de l'exploitation qui produit classiquement blé meunier, orge et colza mais aussi du pois protéagineux dans le cadre de la filière Intact portée par Axéréal. Il est question aussi de matériel, le couple d'exploitant maîtrisant particulièrement ce type de charges, via du matériel en commun et l'achat de machines d'occasion.
Mais le cœur du sujet cet après-midi étant la place des femmes en agriculture, tout le monde se retrouve en salle pour écouter d'abord trois témoignages. À commencer par celui de Sylvie Daguet qui relate qu'elle a rejoint la ferme en 2009 après quinze années passées à l'extérieur. « J'ai su y faire ma place, je me suis formée et aujourd'hui je cherche à dynamiser l'exploitation. Nous formons une équipe résiliente mais nous devons nous adapter face aux aléas », pointe-t-elle.
Un monde très masculin
L'exploitante dresse ensuite les défis à relever : « Nous avons un accès limité aux ressources, il faut parvenir à trouver l'équilibre entre la vie professionnelle et familiale. Et il y a la reconnaissance de notre rôle, ça change mais il y a encore du chemin, le monde agricole reste très masculin. Nous sommes complémentaires des hommes, argue-t-elle, nous ne voyons pas les choses de la même manière ».
Le couple d'exploitants travaille avec une apprentie, Anaëlle Josse, qui témoigne ensuite (lire témoignage ci-dessous) avant de laisser la parole à Isabelle Petit. Elle parle de son côté de sa double casquette de conseillère technique à la Chambre et d'exploitante à Boutigny-Prouais sur une petite surface avec un atelier volaille. « Pour les agriculteurs, c'était un peu compliqué de se faire conseiller par une femme. Aujourd'hui, c'est différent », concède-t-elle. L'exploitante évoque également le gîte qu'elle gère au sein de sa ferme et les défis que constituent l'agrandissement et la transmission : « C'est un bien familial, le transmettre est dans nos gènes ».
Il ressort de ces témoignages la difficulté pour les femmes de concilier activité professionnelle et vie de famille : « La charge de travail est élevée, nous devons être au four et au moulin. Même si les hommes aident, nous avons plus de sollicitations sur le quotidien familial », estime Isabelle Petit.
Quinze propositions
Après ces témoignages, la sous-directrice de la MSA Beauce-Cœur de Loire, Lise Janneau, présente le livre blanc Femmes en agriculture, publié par l'organisme. Celui-ci porte quinze propositions pour lever les freins à l'exercice des métiers agricoles par les femmes. Aux premiers rangs de celles-ci figurent l'importance d'un statut pour les femmes, faciliter l'accès aux soins, favoriser l'engagement dans les instances ou proposer une offre de garde en milieu rural.
Faire de la femme un atout
« La place de la femme est un enjeu sociétal et économique, pose le préfet dans son propos conclusif. Le combat de l'égalité homme-femme passe d'abord par un changement de regard : la femme n'est pas une victime éternelle que l'homme doit protéger. Il faut faire de la femme un atout. C'est bien de voir des parcours inspirants. Des femmes qui réussissent font évoluer les choses, donnent confiance, forcent le changement de regard. En agriculture, le défi du renouvellement de génération ne sera relevé qu'avec les femmes. Nous avons besoin de vous, c'est bon pour l'agriculture, bon pour l'économie et bon pour notre pays ».
Témoignage
« L'alternance m'a permis de prendre confiance en moi »

La visite du préfet sur l'exploitation de la famille Daguet, le 29 avril à Serazereux, donne l'occasion à Anaëlle Josse — elle travaille sur l'exploitation en tant qu'apprentie en première année de BTS au campus Natur'alim de La Saussaye — de livrer son témoignage.
Du concret
« J'ai choisi l'alternance car c'est du concret. Je l'ai fait en dépit des remarques que j'ai entendues, je voulais montrer que si, c'est possible. Après plusieurs refus, j'ai trouvé la famille Daguet qui m'a acceptée, n'étant pas dérangée par le fait que je sois une femme. Je prévois de reprendre l'exploitation familiale ensuite, je serai la sixième génération, et j'aurai de bonnes bases. L'alternance m'a permis de prendre confiance en moi. Monsieur Daguet me confie des travaux en autonomie. De plus, c'est bien de voir des exploitants qui innovent, qui mènent des projets, ça m'inspire pour mes propres projets. Tous les jours, c'est un plaisir de venir ici. Quant à la femme dans le monde agricole, je trouve qu'il y a encore des tabous, des préjugés qui n'ont plus lieu d'être. Ça me donne encore plus envie de montrer que la femme y a toute sa place ».