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Conférence
« Progrès technique n'est pas synonyme d'économie d'énergie »

Un zoom sur les ressources minérales a été fait lors d’une conférence qui s’est tenue le 8 novembre à l’issue de l’inauguration du Forum de Provins.

Provins, lundi 8 novembre. Intervention de Patrick Hugues et Florian Fizaine.
Provins, lundi 8 novembre. Intervention de Patrick Hugues et Florian Fizaine.
© L.G-D. - Horizons

Dans le cadre du Forum de Provins, qui avait pour thème cette année les ressources naturelles, s'est tenue une conférence à deux voix intitulée « Les ressources minérales : le défi » animée par Patrick Hugues, docteur en biotechnologie et directeur du programme scientifique Ressources minérales et économie circulaire au BRGM*, et Florian Fizaine, enseignant chercheur en économie avec une spécialité métaux et économie circulaire.

Rappelons que le décollage des besoins en ressources naturelles a débuté avec la révolution industrielle et s’est accéléré après la Seconde Guerre mondiale. Ce phénomène, selon l’économiste, est lié à l’augmentation de la population (multipliée par sept en 200 ans) et à l’abondance économique (selon l’économiste et historien Maddison, entre 1820 et 2020 la richesse matérielle et marchande a été multipliée par dix). La conjoncture de ces deux facteurs engendre un PIB multiplié par 700 sur cette période d’où une forte augmentation des besoins pour toutes les ressources (multipliés par 20 en moyenne). Le bilan matière s’alourdit et se déséquilibre vers des ressources non renouvelables. Et on continue à taper dans le stock. La demande en cuivre, utilisé depuis l’Antiquité (entre 400 et 14 000 tonnes/­an pendant 4 000 ans), a décollé en 1800 avec depuis une utilisation multipliée par 1 000. La consommation actuelle est de 20 millions de tonnes par an.

Actuellement, on parle de transition énergétique (ou de décarbonation énergétique), à savoir des énergies qui émettent moins de CO2 (nucléaire, éolien, solaire, énergie marine par exemple). Ce sont de nouveaux systèmes énergétiques complexes composés de nombreux éléments à faire venir. Ainsi, produire 1 kWh d’une énergie classique ne nécessitait pas d’acier contrairement aux nouvelles énergies qui requièrent acier et autres minerais. « Si nous passons à 100 % d’énergie renouvelable, que se passera-t-il ?, interroge Patrick Hugues. Un système plus vert fera appel à des quantités de métaux et d’énergie pour les transformer beaucoup plus importantes ».

Et pour les véhicules ? Une peugeot 208 est 50 % plus lourde en version électrique, notamment en raison du poids des batteries. À vitesse constante, elle consomme plus d’énergie en sus du coût des matières premières.

Autre transition en cours, celle du numérique. Dans un premier temps, le volume des téléphones portables a été réduit. Aujourd’hui on assiste à l’agrandissement de la taille des écrans. La consommation associée aux NTIC (Nouvelles technologies de l'information et de la communication) peut représenter 20 à 80 % de la consommation de métaux. La demande augmente en quantité mais aussi en diversité du fait de la complexité grandissante des objets. Or « l’Europe est dépendante à plus de 50 % d'une vingtaine de substances minérales quand la Chine est le premier pays producteur minier. Les activités extractives et de première transformation se font dans des pays à faible coût de main-d’œuvre et soumis à peu de règles environnementales. Ainsi, par exemple, le lithium d’une batterie européenne voyage plus de 30 000 km entre le site d’extraction et son utilisation finale ». L’activité minière se décompose en trois étapes : l’extraction à ciel ouvert ou souterraine, étape qui consomme le plus d’énergie (10 % de la consommation énergétique mondiale), l’activité minéralurgique et métallurgique (concentration de la quantité en métal), qui a beaucoup d’impacts (qualité de l’air, biodiversité, forêt, eau et sols, déchets, santé, financement de conflits armés, corruption). « Comme toutes les activités industrielles, elle a son impact d’où une montée des oppositions (principe du Not in my backyard — cas des éoliennes en France —, à la croissance) », a expliqué Patrick Hugues qui rappelle que de l’exploration à l’exploitation d’une mine, il faut trente ans. Deux pays européens n’ont actuellement pas de projets miniers, la France et l’Italie.

Nouveauté en développement : la mine urbaine (recyclage et ressources associées aux objets en fin de vie) qui doit devenir une réserve de ressources. Le recyclage reste faible avec un potentiel sous-développé et fait face à des difficultés. « Le progrès technique ne permet pas toujours de réduire ou d’économiser des ressources à l’instar des écrans plasma. Cette nouvelle technologie a favorisé notre confort avec des écrans plus grands. Il faut s’attaquer aux causes et non à nos modes de vie. À la base le PIB est un indicateur économique et non de bien-être de la société. Rapidement la question de la sobriété va se poser », ont conclu les intervenants.

*Bureau de recherches géologiques et minières.


Les ressources naturelles au Forum de Provins

 

Dédié au développement durable, le Forum de Provins met en avant chaque année une thématique spécifique au cœur de son exposition et des visites sur le terrain. La 18e édition, qui s’est achevée samedi 13 novembre, interrogeait sur « Allons-nous manquer de ressources naturelles, qu’elles soient vitales à l’instar de l'eau ou qu’elles permettent de fabriquer des choses ? ».

Inaugurée lundi 8 novembre en présence du maire Olivier Lavenka, de représentants de l’Éducation nationale et des différents partenaires, l’exposition, qui reçoit de nombreuses classes de primaire, collège et lycée, permettait de faire le tour des ressources naturelles, renouvelables ou non. Au centre, une exposition interactive intitulée « Matériaux l’expo composite » était fournie par Lacq odyssée, centre de culture scientifique, technique et industrielle.

De la mise en avant des argiles du Provinois et de leur exploitation, au pétrole exploité par la société Vermillon, ou Saipol et le transporteur Oury qui dès 2019 ont mis en place quatre bennes à ordures roulant à l’Oleo 110, le gaz, la filière des granulats et de leur recyclage (40 % des granulats utilisés en Île-de-France), la gestion des déchets, Veolia et l’eau, le tour d’horizon de la thématique était complet.

Pour la partie ressources naturelles renouvelables, on retrouvait le syndicat d’eau potable dont l’espace était animé par des agriculteurs, Eau de Paris, la filière bois et l’agriculture. « Nous avons un lien avec de nombreux stands. L’agriculture essaie d’être un acteur du territoire le plus multiperformant possible. C’est important d’être au cœur des ressources », a souligné le vice-président de la chambre d’Agriculture de région Île-de-France, Guillaume Lefort. « Nous disposons de beaucoup de ressources sur notre territoire : la terre nourricière, avec des agriculteurs qui créent de la valeur, la forêt — on peut encore impulser beaucoup de choses comme la valorisation des bois le long des routes départementales —, l’eau qui alimente le territoire mais également Paris, les granulats, les argiles, un sujet majeur avec l’exploitation nouvelle génération du kaolin », a souligné Olivier Lavenka pour qui ce forum permet également aux élèves de s’ouvrir.

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