Val-d'Oise
[VIDÉO] Sécurité en milieu rural : deux ministres et une convention inédite en France
Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, et Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, se sont déplacés dans le Val-d'Oise mercredi 23 juillet. Cette rencontre avec la profession agricole a été l'occasion d'échanger sur la sécurité en milieu rural.
Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, et Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, se sont déplacés dans le Val-d'Oise mercredi 23 juillet. Cette rencontre avec la profession agricole a été l'occasion d'échanger sur la sécurité en milieu rural.


C'était une première en France, et il fallait marquer le coup. La convention départementale de partenariat relative au renforcement de la sécurité et de la tranquillité en milieu rural signée dans le Val-d'Oise mercredi 23 juillet n'a pour le moment pas d'équivalent dans d'autres départements. « La convention entérine une pratique entre le monde agricole, les forces de l'ordre et la préfecture et fait en sorte que tout ce qui est construit soit pérennisé dans le temps », justifie le préfet Philippe Court.
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Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, et Annie Genevard, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, ont donc fait le déplacement à Condécourt pour symboliser cette collaboration entre la profession agricole et les services de l'État (préfecture et forces de l'ordre). « C'est assez exceptionnel pour nous », affirme Guillaume Moret, président de la FDSEA Île-de-France. « Nous avons, ici, une organisation exemplaire de lutte coordonnée contre les actes de délinquance », souligne la ministre de l'Agriculture. « Nous attachons une bienveillance extrêmement importante à la question de la sécurisation dans les campagnes de nos agriculteurs », ajoute le ministre de l'Intérieur.
En marge de la signature de la convention, les deux ministres ont échangé un long moment avec la profession agricole, mais aussi avec les forces de l'ordre et le préfet. « Bruno Retailleau a confirmé son soutien à l'agriculture », explique Paul Dubray, président de l'Union du Val-d'Oise. « Nous avons abordé les questions de sécurité dans les exploitations, avec les problématiques d'incivilités, de vols, de dégradations, de rodéos sauvages et de dépôts sauvages », détaille Guillaume Moret.
Un double message
« Nous avons beaucoup parlé de la convention qui est une première », résume Paul Dubray. Des référents ont été désignés par la FDSEA Île-de-France et au sein de chaque commissariat de police et compagnie de gendarmerie pour améliorer la transmission des informations. Annie Genevard a d'ailleurs annoncé l'existence d'une circulaire pour dupliquer ce travail aux autres départements français. « C'est hyper intéressant d'être précurseur. C'est comme pour la convention avec les pompiers qui fonctionne, mais qui n'existe pas chez tout le monde. Nous sommes un peu le département test », raconte le président de l'Union du Val-d'Oise.
Mathieu Hardy, jeune agriculteur de 26 ans installé depuis 2021, mais surtout hôte du jour (voir ci-dessous) a pu témoigner : « J'ai été victime d'incivilités, notamment de rodéos sauvages, à plusieurs reprises, que ce soit sur des parcelles en jachère ou des parcelles cultivées, notamment en blé ». Son exploitation est située à la limite du Val-d'Oise et des Yvelines, également à la limite des secteurs police et gendarmerie. « Il y a eu une période où c'était tous les week-ends. Parfois avec deux ou trois motos ou quads, parfois avec plus de dix engins. Il n'y a pas possibilité de communiquer avec eux, dès qu'on s'approche, ils prennent la fuite. On n'est pas à l'aise, ça fait peur parce qu'on est tout seul contre quinze, ça peut mal finir », complète-t-il. « Ce partenariat nous rassure beaucoup », dit le jeune agriculteur.
Parmi les sujets abordés, Samuel Vandaele, président de la FRSEA Île-de-France, a notamment pu mettre en exergue la problématique des vols de GPS. Sur ce point, les ministères de l’Agriculture et de l’Intérieur ont engagé « un travail commun avec les constructeurs de matériel agricole pour améliorer la traçabilité de ces équipements et faciliter l’identification des réseaux de délinquance ».
« Je suis venu avec un double message, clame Bruno Retailleau. Un message de soutien parce que nos agriculteurs sont le visage de la France qui travaille, de celles et ceux qui nourrissent les Français. Il y aussi un message de fermeté. Il ne faut pas croire que la violence, les vols, les rodéos soient le monopole des quartiers et des villes. Grâce à l'action très ferme de nos forces de sécurité intérieure, nous avons de très bons résultats en campagne puisque les deux tiers des véhicules saisis et 70 % des interpellations après des rodéos sont en zone campagne ». Dans le Val-d'Oise, sur les 173 engins saisis en 2025, 70 l'ont été en milieu rural.
Plusieurs réponses vont donc être apportées. Dans les mois à venir, les deux ministères travailleront à « simplifier le dépôt de plainte, notamment directement sur les exploitations agricoles ». Un travail va également être mené pour mieux indemniser les agriculteurs victimes de dégradations massives. Cela passera notamment par l'engagement de procédure civile en réparation au niveau judiciaire. « Peu importe la sanction infligée à l'auteur des faits [par la juridiction pénale], dès lors qu'il est reconnu coupable, il devient responsable civilement, ce qui permet à l'exploitant agricole de recouvrer une partie des dégâts occasionnés », détaille le préfet du Val-d'Oise.
Enfin, des pistes législatives sont également à l’étude, notamment à travers la création d'un délit d’entrave aux activités agricoles en cas d’intrusion dans une exploitation. Annie Genevard l'affirme : « Toutes ces réponses visent à montrer aux agriculteurs que nous avons pris la mesure de la délinquance dont ils sont victimes. Ils ont besoin du soutien de la nation parce qu'ils remplissent peut-être la mission la plus noble qu'il soit, celle de nourrir ».

« Trouver des solutions »
Paul Dubray, président de l'Union du Val-d'Oise, s'est satisfait de cette visite ministérielle : « Ça montre que nous ne nous reposons pas sur nos lauriers, que nous essayons de trouver des solutions pour avancer le mieux possible ». La confiance est le maître-mot de cette relation entre le monde agricole et les services de l'État. « La proximité est essentielle pour agir au plus vite », souligne le préfet Philippe Court. « C'est du travail tous les jours pour créer cette confiance. Il faut apprendre à se connaître, ça ne se fait pas du jour au lendemain. Ils prennent des risques en signant cette convention parce qu'ils s'engagent à être plus rapides et plus efficaces », ajoute Paul Dubray.
« Un échange constructif »

Mathieu Hardy, exploitant agricole installé en 2021 à Condécourt (Val-d'Oise), mais surtout l'hôte de la visite ministérielle était surpris de pouvoir témoigner des difficultés rencontrées ces derniers mois : « Je n'aurais jamais pensé accueillir des ministres un jour dans ma vie, encore moins aussi tôt dans ma carrière. C'est impressionnant, mais c'est une super bonne expérience. Cela permet d'avoir un échange constructif sur le sujet, et d'avancer. Je suis content. Il y a eu beaucoup de stress avant qu'ils arrivent, pendant qu'ils étaient là, mais la pression est redescendue quand ils sont partis ».
Des motos pour la gendarmerie
Parmi les annonces effectuées lors du déplacement ministériel, les agriculteurs ont pu apprendre que le Département du Val-d'Oise allait mettre à disposition de l’Escadron départemental de sécurité routière du Val-d'Oise (EDSR) quatre motocross. « Il s'agit d'un investissement de près de 40 000 euros dans le cadre de notre politique de soutien aux agriculteurs valdoisiens, et aux côtés des autorités dans la lutte contre les rodéos sauvages en zone rurale », précise le conseil départemental. Ces engins « sont beaucoup plus adaptés pour patrouiller dans les zones rurales et agricoles » que les motos dont disposaient jusqu'à présent les gendarmes du département. « Je veux rendre hommage à la présidente du Département parce que même les collectivités s'engagent [ dans la lutte contre la délinquance ]. Le Département a acquis quatre motos qui nous permettront de poursuivre les fauteurs de troubles en matière de rodéo », a souligné Bruno Retailleau.