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"L’impact est un peu différent selon les cas et la filière"

Éleveur de volailles de chair à Crottes-en-Pithiverais, Ludovic Giry préside la section avicole de la FNSEA du Loiret et est aussi vice-président de l'Association des aviculteurs du Loiret. Il explique l’impact du Covid-19 sur cette filière.

© LAR


Horizons : Quel est l’impact du Covid-19 sur la filière avicole du Loiret ?

Ludovic Giry : Bien que la viande de volaille soit un bien de consommation important, notamment en grandes surfaces, toute la partie restauration collective, cantines, restauration rapide est à l’arrêt depuis deux mois. Cette crise sanitaire a donc un impact catastrophique sur les produits festifs (pintade, caille, pigeon, canard…) car ce sont des produits que l’on ne trouve pas au supermarché, mais dans les restaurants ou chez le traiteur.

D’un côté nous avons les abattoirs spécialisés dans les barquettes qui tournent à plein régime et de l’autre ceux qui font du vrac pour la restauration hors domicile (RHD) qui sont au ralenti et qui ont dû réorienter leur production pour ne pas s’arrêter. Globalement, nous pouvons dire que les ventes au détail sont en progression, mais ne compensent pas la perte des débouchés de la RHD. Faute de débouchés, les œufs sont détruits dans les couvoirs et des reproducteurs sont abattus en filières canard, pintade et pigeon.

Pour la filière œufs, la situation est aussi un peu bizarre. On a beaucoup entendu crier à la pénurie d’œufs, or c’est totalement faux. Ce n’était pas les œufs mais les boîtes qui manquaient. Les éleveurs continuaient de produire mais la logistique ne suivant pas, du stock s'est accumulé…

Les éleveurs loirétains ont été impactés ?

La majorité des 220 éleveurs loirétains fait de la volaille de chair (poulets et dindes) et a pu continuer à travailler « normalement ». Il n’y a pas vraiment eu de gros changements, si ce n’est une réorganisation de l’approvisionnement en aliments, de la livraison des poussins et des conditions de ramassage.

L’impact est un peu différent selon les cas et la filière. Le poulet a tout de même eu une contrainte supplémentaire avec l’annonce d’un vide sanitaire rallongé. Environ quatre à six semaines au mois de mai, et ce sera peut-être pareil au mois de juin.

Heureusement, de nombreux éleveurs loirétains ont une production polyvalente. C’est-à-dire qu’ils sont capables de faire du poulet comme de la dinde, ce qui leur permet d’être plus flexibles et donc de mieux gérer les aléas de l’offre et de la demande.

Pour ma part, je vais essayer de désengorger les éleveurs qui ne peuvent pas faire les deux en remplissant mes trois bâtiments en dinde au lieu de deux en temps normal.

Avez-vous subi une augmentation des coûts de production ?

Globalement non, car une grosse partie des éleveurs du département sont en intégration avec un contrat annuel qui est négocié une fois par an. Le prix du gaz par contre fait le yoyo. Il a fortement baissé, mais va suivre le prix du pétrole en décalé de six mois et va donc inévitablement remonter !

Des adaptations particulières au sein de votre exploitation ?

L’élevage avicole respecte déjà de nombreuses règles de biosécurité. Le confinement n’a donc pas changé grand-chose à notre quotidien car nous avions déjà le réflexe de nous laver régulièrement les mains, de passer par le sas sanitaire, de nous changer en passant d’un poulailler à l’autre… Le problème peut se poser quand une équipe intervient. C’est pourquoi j’ai réorganisé le ramassage pour qu’il se fasse en une seule fois au lieu de deux habituellement.

Afin de protéger les salariés et les éleveurs, j’ai aussi créé une note qui rappelle les bons gestes de protection sanitaires à adopter, en plus des règles de biosécurité respectées habituellement : port du masque et des gants, lavage des bottes, utilisation du gel hydroalcoolique, désinfection des locaux, collation individuelle, un mètre de distanciation physique…

C’est comme un petit rappel à l’ordre des choses qui devraient être faites en temps normal. Des choses bien souvent basiques, du bon sens en somme, mais qui font que tout le monde est rassuré. C’est tout bête mais quand un livreur vient, j’ai maintenant le réflexe d’avoir mon propre stylo. Il faut continuer à être prudent ! Ce qui est sûr c’est qu’il y aura un avant et un après Covid-19. À nous de rester vigilants lorsque l'on croise le personnel sur l’élevage.

Une solution miracle ?

Je n’ai pas de solution miracle… Il faut prendre son mal en patience, tout va rentrer dans l’ordre car nous devrons toujours continuer à nourrir la population. Aujourd’hui le label, le circuit court, le local sont des attentes du citoyen. Il faut donc réfléchir à des signes de qualité identifiables et les valoriser davantage. 48 % de la volaille présente en France est importée. C'est énorme ! Surtout quand on sait que les autres pays ne respectent pas scrupuleusement les règles sanitaires imposées et le bien-être animal.

L’agriculture française respecte les règles européennes, mais aussi et surtout les règles françaises qui sont plus strictes. Tout le monde voit que les agriculteurs français font leur boulot de manière propre et honnête. Le Président de la République et les grandes surfaces martèlent qu’il faut privilégier la production française. C’est bien, mais maintenant il faut des actes ! Il faut donc que les citoyens regardent davantage ce qu’ils mangent et que les politiques contrôlent plus les importations.

De plus, il est nécessaire de communiquer sur le fait que la France a réduit, et même dépassé, la demande de l’État qui est de réduire de 25 % l’utilisation d’antibiotiques. Nous en sommes à 40 % alors que l’Allemagne peine encore à arriver au chiffre demandé. C’est une volonté, mais celle-ci représente des frais. Ce n’est pas parce que l’on ne met pas d’antibios que ça coûte moins cher. Les animaux ont besoin de vitamines, de sels minéraux, d'huiles essentielles, qui représentent un coût.

Je suis un consommateur, un père de famille, mais surtout un éleveur qui a à cœur de faire les choses sérieusement. Nos pratiques évoluent, nos élevages progressent, et pas uniquement les labellisés. Après, il faut qu’il y ait une impulsion politique pour réussir cette transition qui ne se fait pas sans frais !

Propos recueillis par Doriane Mantez

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